JUSTICE
par Frédéric Pinchon
Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a provoqué une onde de choc. C’était après l’énoncé des premières condamnations liées aux débordements, en marge de la victoire du PSG. Pour le garde des Sceaux, « le système judiciaire n’est plus adapté à la violence de la société ». Face à une surpopulation carcérale historique – plus de 83.000 détenus dans les prisons françaises –, il propose une suppression du sursis.

Dans la foulée, les aménagements de peine, même pour un premier délit, disparaîtraient. À Tourcoing, ville du Nord régulièrement confrontée aux violences urbaines, les réactions sont à cette annonce partagées.
Favorable à la fermeté
Rencontré dans le quartier de la Bourgogne, Marc, 52 ans, habite ici de longue date. Il ne cache pas sa lassitude : « On en a marre des petits délinquants qui sortent libres le lendemain de leur garde à vue. Darmanin a raison. Il faut marquer un coup d’arrêt ». Il ajoute : « S’ils savent qu’ils risquent la prison ferme à la première faute, peut-être que les voyous y réfléchiront à deux fois… »

À quelques rues de là, Samira a 28 ans. Elle a été récemment condamnée à du sursis. C’était pour un vol à l’étalage. Elle exprime une autre vision : « J’ai fait une erreur et mais je l’ai payée. Le sursis m’a permis de garder mon emploi et de reconstruire ma vie », dit-elle. Et d’ajouter : « Si j’étais allée en prison, ça aurait tout détruit. On veut enfermer les gens. Pourtant, on ne se demande jamais pourquoi ils dérapent. »
Un juge perplexe
Au tribunal de Lille, un juge du siège préfère rester anonyme. Il déplore une approche trop répressive du problème : « On envoie un signal politique. Hélas, ce n’est pas comme ça qu’on désengorge les prisons. Supprimer les aménagements, c’est nier la réinsertion. » Selon ce magistrat, « en prison, sans accompagnement, les petits délits deviennent souvent les premiers pas vers la récidive. »

Enfin, Christophe est policier dans une brigade de nuit tourquennoise. Il se montre plus nuancé : « On arrête des gars qu’on recroise deux jours après. C’est décourageant. Mais balancer tout le monde en prison, ça va juste engorger un système déjà à bout ». Selon ce représentant de l’autorité, « il faut des peines fermes mais, surtout, qu’elles soient exécutées. Sinon, ce ne sont que des mots. »

Le débat est lancé. Entre fermeté, efficacité, justice et prévention, la réforme proposée par Gérald Darmanin divise profondément, même dans les rues les plus confrontées à la violence. À son arrivée à l’Élysée, Emmanuel Macron a promis de livrer 15.000 places de prison. À ce jour, seules 5.000 ont été construites.
– À lire aussi –
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.