SAINT-QUENTIN
par Frédéric Pinchon
Une petite révolution ferroviaire bouleverse le quotidien de nombreux Picards : depuis quelques jours, le TGV reliant Paris à Bruxelles, marque désormais un arrêt à Saint-Quentin, dans l’Aisne. Une première depuis la création de cette ligne à grande vitesse, il y a quarante ans. Cette halte inattendue, presque anachronique, interroge autant qu’elle réjouit.

Saint-Quentin, ville de près de 55.000 habitants, n’avait jusque-là jamais été desservie par un TGV direct. Pour rejoindre Paris ou Bruxelles à grande vitesse, les habitants devaient emprunter des TER vers la gare TGV Haute-Picardie — surnommée à sa création “la gare des betteraves” pour son isolement au milieu des champs —, une infrastructure construite à grands frais à la fin des années 1990 précisément pour desservir la région à grande vitesse. Alors pourquoi ce revirement stratégique ?
Rééquilibrage territorial
Contactée, la SNCF évoque “un rééquilibrage territorial” et une volonté de “rapprocher les villes moyennes du réseau européen”. Mais certains observateurs y voient aussi une manœuvre politique : “C’est clairement une réponse aux critiques récurrentes sur la désertification ferroviaire des territoires dits secondaires”, analyse Alain Dubois, urbaniste spécialiste des transports. “Saint-Quentin, c’est un bassin de vie dynamique, mais il souffre d’un relatif isolement. Cet arrêt vise sans doute à redonner un peu de souffle.”

Sur le quai de la gare dimanche matin, les réactions oscillent entre enthousiasme et étonnement. Marie, 34 ans, cadre dans la communication, n’en revient pas : “Je faisais la navette jusqu’à la gare Haute-Picardie en voiture (ndlr : 40 kilomètres). Là, je gagne presque une heure de trajet !”. Plus sceptique, Jean-Pierre, retraité et ancien cheminot, s’interroge : “Ils ont mis des millions dans une gare en plein champ, il y a trente ans. Maintenant ils font s’arrêter le TGV en centre-ville ? Ce n’est pas très cohérent…”
Arrêt expérimental ?
Reste à voir si cette halte sera durable ou seulement expérimentale. Pour l’heure, un aller-retour quotidien est prévu, avec un temps de parcours inchangé pour les autres usagers. Un compromis technique rendu possible grâce aux progrès récents de la signalisation ferroviaire.

Une chose est sûre : ce nouvel arrêt redonne à Saint-Quentin, capitale de Haute-Picardie, une visibilité bienvenue sur la carte du rail français. La nouvelle relance, plus largement, le débat sur la place des villes moyennes dans les grands projets d’infrastructure.
– À lire aussi –
À Gauchy, il agresse son copain et le met dans le coma
Marine Le Pen radiée du conseil départemental du Pas-de-Calais
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.