CALAIS
par Frédéric Pinchon
C’est un coup dur pour l’industrie textile calaisienne. Marck & Balsan, l’usine spécialisée dans la confection de vêtements militaires, annonce sa fermeture dans quelques semaines. Cette décision intervient après la rupture de son principal contrat avec l’armée française. Désormais, la production est délocalisée à Madagascar. Cette fermeture plonge dans l’incertitude les 66 salariés (65 femmes et 1 homme) de l’entreprise. Certains travaillent sur place depuis des décennies… Depuis vingt-cinq ans, Marck & Balsan habille les soldats français. L’usine, implantée à Calais, est reconnue pour son savoir-faire dans la confection de tenues militaires.

C’est un secteur exigeant en termes de qualité et de précision. Mais cette expertise n’a pas suffi à sauver l’entreprise. Le contrat avec l’armée représentait l’essentiel de son activité. Il a été transféré à Madagascar, où les coûts de production sont nettement inférieurs à la France. Pour les salariés, c’est un choc. « On savait que c’était fragile mais on espérait toujours que ça durerait », confie l’une des ouvrières, Georgette, la voix tremblante. Sa collègue, Martine, ajoute : « On est comme une famille ici. Et maintenant, tout s’écroule. »
Le RN en première ligne…
Jeudi soir, l’équipe du nouveau député Rassemblement national (RN) de Calais, Marc de Fleurian, a rencontré les salariés. C’était sur le parking de l’usine, à la sortie du travail. Des tracts de soutien ont été distribués. Ils reprennent la question posée à l’Assemblée nationale par le député, mercredi, à Patricia Mirallès. C’est la ministre déléguée auprès du ministre des Armées. « Je lui ai remis une lettre en main propre à propos de la fermeture de l’usine », a confié jeudi le député RN, joint par téléphone.
« Dans ma ville de Calais, ce ne sont pas seulement 66 ouvrières, ce sont aussi leurs familles qui nous demandent de l’aide et vous demandent des comptes », a aussi déclaré Marc de Fleurian lors de la séance de question au gouvernement, mercredi. Il a ajouté : « Votre gouvernement doit s’engager (…) Dans l’urgence, accompagnez Marck & Balsan dans la recherche de nouveaux contrats ». Dans la foulée, le parlementaire a abordé ce sujet brûlant au premier conseil communautaire de Calais : « C’est inadmissible que l’argent des contribuables français serve à financer des emplois à l’étranger ».

Même son de cloche pour Pierre-Henri Dumont, ancien député « Les Républicains ». Il était interrogé mardi par la rédaction. Pour lui, la fermeture de Marck & Balsan « est une aberration économique et sociale ». Il poursuit ainsi : « Cet unique contrat avec l’armée assurait la pérennité de l’usine. Aujourd’hui, on sacrifie des emplois locaux pour des raisons purement financières ». Comme Marc de Fleurian, il s’indigne que « l’argent des impôts des Français serve à financer des emplois à Madagascar, où le coût du travail est dérisoire ». Cette critique de l’ex-parlementaire LR soulève des questions plus larges. Elle interroge notamment sur les choix stratégiques de l’État en matière de commandes publiques.
…et des élus silencieux
D’autres voix politiques se font étrangement discrètes. Ni Natacha Bouchart, maire de Calais, ni Xavier Bertrand, président du conseil régional des Hauts-de-France, n’ont répondu aux sollicitations de la presse pour commenter cette fermeture. Ce silence contraste avec l’émotion palpable parmi les salariés. « On se sent abandonnées », lâche Nadine, une autre ouvrière. Ses larmes coulent sur le tract tendu par la collaboratrice du député RN. Même colère et incompréhension dans les yeux de sa collègue, Nathalie : « On gagnait peu mais, au moins, on avait notre fierté. Maintenant, on n’a plus rien. »

Depuis l’annonce de la fermeture, la direction de Marck & Balsan semble s’être murée dans le silence. Les appels téléphoniques au standard restent sans réponse. Cet état de fait laisse le personnel dans l’incertitude quant à leurs droits et à leur avenir. « On n’a même pas eu une véritable explication. On nous jette comme des vieux chiffons », soupire Mathilde. La fermeture de Marck & Balsan marque la fin d’une époque pour Calais. Pendant vingt-cinq ans, l’usine a été un pilier de l’économie locale. Elle a fourni des emplois stables dans une région souvent frappée par le chômage.
Tous à France travail !
Aujourd’hui, les employés se préparent à affronter une réalité brutale : dans quelques semaines, ils pointeront tous à France travail, sans perspective immédiate de reconversion. Cette fermeture pose, également, des questions plus larges. Elles concernent l’avenir de l’industrie textile en France. Alors que les délocalisations se multiplient, les salariés de Marck & Balsan sont les derniers témoins d’un savoir-faire national. Il risque de disparaître à jamais. Dans quelques semaines, les portes de Marck & Balsan se fermeront définitivement. Une page se tourne laissant, derrière elle, des vies brisées et une communauté en deuil. Les machines seraient déjà prêtes à partir…
Dernière heure :
Mieux vaut tard que jamais ! Jeudi 13 février, dans un communiqué de presse daté du 10, Xavier Bertrand et Nathalie Bouchard écrivent au ministre des Armées, Sébastien Lecornu : "Nous avons vu que votre ministère était en train de développer un projet de création d'une filière industrielle française de recyclage des effets d'habillement des armées. Nous tenons à vous faire savoir que nous sommes candidats pour accueillir cette filière dans les Hauts-de-France et plus particulièrement dans le Calaisis (...)".
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