POLITIQUE

par Frédéric Pinchon

Coup de tonnerre à Lille. Après vingt-quatre ans passés à la tête de la ville, Martine Aubry, maire socialiste de Lille et présidente de la Métropole européenne de Lille (MEL), a annoncé sa démission de façon inattendue. Elle renonce à ses mandats de maire de Lille et de présidente de la MEL. Cette décision prend de court la population lilloise et la scène politique nationale. Son premier adjoint, Arnaud Deslandes, est amené à lui succéder, à la mairie de Lille, jusqu’aux prochaines élections municipales de 2026. Mais ce départ soudain soulève des questions : était-il prévisible ? Pourquoi maintenant ? Et, surtout, quel avenir pour Lille, capitale des Hauts-de-France avec ses 237.000 habitants ?

Un départ prévisible ?

Martine Aubry avait succédé à la maison commune à Pierre Mauroy, ancien Premier ministre de François Mitterrand, lors de la vague rose de 1981. Jusqu’à présent, elle n’avait jamais donné de signes apparents d’une démission prochaine. Toutefois, ces dernières années, la maire de Lille avait, à plusieurs reprises, fait allusion à son désir de “passer le flambeau”. L’élue n’avait pas, pour autant, précisé de date ou de plan concret pour partir. Des proches rapportent qu’elle évoquait, parfois, sa lassitude face à l’exercice du pouvoir. Néanmoins, personne ne s’attendait à un départ aussi soudain. D’autant plus qu’elle avait encore des projets en cours pour sa ville.

Martine Aubry, maire de Lille, annonce sa démission : "Le moment est venu de passer la main à une nouvelle génération".

Le premier adjoint, Arnaud Deslandes, homme discret et réputé compétent, se retrouve désormais propulsé sur le devant de la scène. Son défi sera de poursuivre la politique, initiée par Martine Aubry, tout en préparant les futures échéances électorales. Mais le vide laissé par l’ancienne ministre des Affaires sociales risque de créer des remous dans le paysage politique lillois. Martine Aubry a, derrière elle, un héritage politique imposant. Après avoir pris la relève de Pierre Mauroy, en 2001, elle a profondément marqué Lille par son style de gouvernance.

Femme de convictions, elle est surtout connue pour être l’instigatrice de la loi sur les 35 heures. C’était à l’époque où elle était ministre de l’Emploi et de la solidarité du gouvernement Jospin. Sa réforme a laissé une empreinte durable sur le monde du travail en France. Outre son passage comme ministre, Martine Aubry a façonné Lille au fil des ans. Elle s’est attachée à moderniser la ville, tout en conservant son identité forte. Sous son mandat, l’ex-maire a encouragé le développement culturel. Elle a, notamment à son crédit, l’ouverture du musée d’art moderne Lille métropole (LaM).

Mélenchon en embuscade

Toutefois, ses détracteurs lui reprochent une gestion parfois jugée trop rigide, notamment en matière d’urbanisme et de mobilité. Le leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon semble d’ores et déjà se préparer pour les prochaines élections municipales, à Lille. Dame ! 2026 c’est demain et diriger, c’est prévoir… Mélenchon, bien que natif de Tanger, a toujours entretenu un lien fort avec la région du Nord. Il pourrait y voir une opportunité de s’implanter localement. Dans son entourage, il se murmure qu’il aurait des ambitions pour s’emparer du fauteuil de maire. Cette perspective promet de raviver les tensions politiques entre les différents courants de gauche.

Martine Aubry, maire de Lille, annonce sa démission : "Le moment est venu de passer la main à une nouvelle génération".

Le leader de LFI n’a d’ailleurs pas tardé à réagir à l’annonce de la démission de Martine Aubry. Il s’est ouvertement moqué de son discours d’adieu. “Elle a passé dix minutes à s’autocongratuler pour ses réalisations. Cependant elle a oublié de mentionner qu’elle a rendu le stationnement payant à Lille”, a-t-il lancé. Le tacle illustre bien les relations tendues entre les deux figures de la gauche française. Pour sa part, sur son compte Twitter, David Guiraud, député LFI du Nord, rend un timide hommage à Martine Aubry : “Son engagement et sa longévité forcent le respect. Pour le reste, elle incarne fidèlement le Parti socialiste et ses évolutions, des 35 heures au refus de censurer Bayrou”. Pour le parlementaire, “dans un an, les Lillois se prononceront pour leur nouveau maire (…) nous y travaillons”.

Le RN se frotte les mains

Du côté de l’extrême droite, Mickaël Taverne est député RN de Maubeuge (Nord). Invité à réagir, il dit : “Le départ d’Aubry est une bonne nouvelle pour les Lillois. Elle monopolise la vie politique depuis 1995”. Selon le parlementaire, “en un quart de siècle, sa ville s’est dégradée au point de devenir sale”. Ancien policier de métier, Mickaël Taverne déplore “la hausse de la délinquance à Lille. Martine Aubry est une ‘anti-flic’” ce n’est pas un secret”.

Martine Aubry, maire de Lille, annonce sa démission : "Le moment est venu de passer la main à une nouvelle génération".

Même genre de réaction de Marc de Fleurian, aussi député RN mais à Calais (Pas-de-Calais). “La démission de Martine Aubry marque la fin d’un cycle politique à Lille. On retiendra que, durant ses mandats successifs, Lille a vu les classes moyennes et populaires être remplacées par les bobos et l’immigration”. Il poursuit ainsi : “La mise en place d’une ZFE (ndlr : zones à faible émission de mobilité) en est la dernière étape. Cela contribue à éloigner encore davantage les privilégiés de la métropole, de ce que vivent la majorité des Français, dans les zones périphériques”. Hormi LFI, les autres partis de gauche ne se sont pas rués sur les micros. La rédaction a contacté des maires de l’ex-Bassin-minier du Pas-de-Calais, réputé socialiste. Sylvain Robert (PS Lens), Laurent Duporge (PS Liévin) et Laurent Gacquerre (UDI Béthune) ont décliné l’invitation !

Réactions des Lillois

L’annonce de cette démission surprise suscite moultes réactions parmi les Lillois. Certains se disent tristes de voir partir une figure emblématique du Nord. D’autres estiment qu’il était temps de passer à une nouvelle génération de dirigeants. “Elle a fait beaucoup pour la commune mais il fallait bien que ça s’arrête un jour”, confie Amandine, 42 ans, commerçante dans le Vieux-Lille. “On ne peut pas diriger indéfiniment.” De son côté, Paul, retraité de 68 ans, du quartier Mont-de-terre, salue le bilan de Martine Aubry. Il se dit quand même curieux de voir ce que l’avenir réserve : “Une page se tourne. Arnaud Deslandes a du potentiel mais Jean-Luc Mélenchon pourrait bien lui voler la vedette en 2026.”

Martine Aubry, maire de Lille, annonce sa démission : "Le moment est venu de passer la main à une nouvelle génération".

Martine Aubry prévoit de quitter la vie politique lilloisee le 15 mars. En effet, le préfet du Nord doit d’abord accepter sa démission. S’ensuivra, le 21 mars, un conseil municipal extraordinaire au cours duquel son premier adjoint prendrait la relève, jusqu’en 2026. Les prochaines semaines seront cruciales pour Arnaud Deslandes. Le poulain de Martine Aubry va devoir s’affirmer dans ce climat politique mouvant. La bataille pour la mairie de 2026 s’annonce d’ores et déjà palpitante.

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